Communiqué du Conseil national consultatif des personnes handicapées du 22 juillet 2020
En bref : Le Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH) alerte le Président de la République et le Premier ministre : l’accessibilité et l’inclusion ont disparu des priorités du gouvernement. Il demande le respect des lois et des engagements pris lors de la conférence nationale du handicap du 11 février dernier. Il souhaite une mobilisation de tous les ministres pour faire face à la crise et demande la réunion du comité interministériel du handicap dès la rentrée de septembre. Un ministre doit être nommé pour piloter cette politique. Le CNCPH demande à être associé à l’écriture des projets de loi pour ne pas oublier les situations de handicap. Il rappelle que chaque ministre doit communiquer de façon accessible. Enfin, le CNCPH salue la création d’une nouvelle branche de la protection sociale et rappelle que l’autonomie ne concerne pas seulement les personnes âgées mais tous les Français, quel que soit leur âge et leurs handicaps.
Trois semaines après l’installation du Premier ministre et de son gouvernement, le Conseil national consultatif des personnes handicapées, composé de 160 membres et chargé d’assurer la participation des personnes handicapées à l’élaboration et à la mise en œuvre des politiques les concernant, s’est réuni en séance plénière ce mardi 21 juillet 2020 et a réaffirmé son attachement à un pilotage global et transversal des politiques publiques permettant la prise en compte systématique des situations de handicap pour les supprimer, les prévenir ou à défaut, les compenser, en application de la loi du 11 février 2005 et de la convention internationale relative aux droits des personnes handicapées.
Au-delà du signal préoccupant lancé par l’absence dans le dispositif gouvernemental d’un ministère dédié aux handicaps placé auprès du Premier ministre, et alors que le Président de la République les avaient affichées comme une priorité du quinquennat, le CNCPH rappelle que les politiques d’accessibilité et d’inclusion ne peuvent souffrir d’aucun ralentissement du fait de la crise. Au contraire, l’accessibilité doit être un des piliers de la politique de relance et en aucun cas en contradiction avec les priorités environnementales d’une part, ni les contraintes budgétaires d’autre part. L’engagement de la puissance publique, des acteurs économiques et des collectivités pour garantir l’accès de tous au droit commun, quels que soient les éventuels handicaps rencontrés, reste une priorité. La moindre pause dans la mobilisation interministérielle dans les 600 prochains jours aurait des conséquences encore plus difficiles à rattraper tant l’impact de la crise sur les personnes dites « handicapées » et leurs aidants sera brutal.
L’accès à l’école, à l’enseignement supérieur et au service civique, l’accès à la culture, l’accès à l’emploi, la sauvegarde des emplois, l’accès aux soins, à la sécurité et à la justice, l’accès au logement, l’accès aux services publics, en ligne et en présentiel, l’accès aux transports et aux mobilités quels qu’en soient les motifs, l’accès à l’information et au débat public, aux activités sportives, aux vacances et aux loisirs, l’accès sans condition à un accompagnement choisi, à une compensation réelle et intégrale des conséquences du handicap ainsi qu’à une autonomie financière au-dessus du seuil de pauvreté : aucun pan de cette mobilisation transversale à l’ensemble des ministères, des administrations et des services publics ne saurait être écarté.
Il en sera de même de l’accessibilité du processus électoral et du débat citoyen, de l’accès à une vie affective et sexuelle, du développement de l’intervention des pairs et de leur formation, de l’habitat accompagné partagé et inséré dans la vie locale, et de l’avancée en âge.
Regrettant l’absence totale de référence à ces impératifs d’accessibilité dans les décrets d’attribution publiés à ce jour, le Conseil national consultatif des personnes handicapées invite le Premier ministre à s’inspirer dès cet été des circulaires prises par ses prédécesseurs depuis 2012 pour engager l’ensemble de son gouvernement et chacun de ses ministres, ministres délégués, secrétaires d’État et hauts commissaires sur des objectifs confirmés et déclinés au plan de relance.
Le Conseil national consultatif des personnes handicapées recommande que le Comité interministériel du handicap (CIH) soit réuni dès septembre 2020 autour du Premier ministre, en y associant le CNCPH et l’ensemble de ses composantes. Cette réunion permettra un point d’étape sur les mesures annoncées lors du CIH du 3 décembre 2019 et de la Conférence nationale du handicap (CNH) du 11 février dernier pour laquelle le Président de la République s’était impliqué, et de définir la feuille de route du gouvernement.
Même lorsqu’ils sont élaborés en urgence, chaque projet de loi et chaque texte réglementaire doivent systématiquement être conçus et rédigés à la lumière des situations de handicap rencontrées ou prévisibles pour les supprimer, les prévenir ou à défaut, les compenser. La co-construction des politiques publiques est la mission première du Conseil national consultatif des personnes handicapées et ses 9 commissions spécialisées, il appartient donc à chaque ministre et au secrétariat général du gouvernement (SGG) de les associer au processus législatif et réglementaire. Les parlementaires sont également invités à se saisir de cet impératif pour chacune de leur proposition de loi et chacun de leurs amendements, là encore, en mobilisant le CNCPH.
D’autre part, il importe au CNCPH que l’expression gouvernementale soit systématiquement accessible à tous les citoyens, quels que soient leurs modes d’accès à l’information : français facile à lire et à comprendre (FALC), interprétation et traduction en langue des signes française (LSF), codage en langue française parlée complétée (LfPC), transcription simultanée et RGAA (référentiel général d’accessibilité des administrations), doivent être mobilisés par chaque ministre, y compris le Premier d’entre eux, pour chacune de leurs interventions, même impromptues. Conformément aux engagements pris lors de la conférence nationale du handicap du 11 février dernier, plusieurs allocutions du Président de la République et du Premier ministre, avaient fait l’objet d’un dispositif d’accessibilité utile et apprécié mais encore irrégulier et imprévisible pour les personnes concernées. L’interprétation en langue des signes française des comptes rendus du conseil des ministres par le nouveau porte-parole du Gouvernement représente une avancée incontestable.
Le portage et l’animation de ces politiques d’accès au droit commun, qui dépendent de l’impulsion du Premier ministre et de l’implication réelle de chaque membre du Gouvernement, doivent encore être régulièrement incarnés à la table du Conseil des ministres par un ministère rattaché au Premier ministre. La création par ailleurs d’un ministère délégué à l’Autonomie doit permettre de concrétiser la nouvelle branche de la protection sociale, à laquelle le Conseil national consultatif des personnes handicapées est attaché, et qui doit prendre en compte les besoins tous les Français, quels que soient leur âge et les handicaps qu’ils rencontrent.