Clôture des 2èmes universités d’été du CNCPH

Clôture des 2èmes universités d’été du conseil national consultatif des personnes handicapées, le 22 septembre 2021, avec Sophie Cluzel, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée des Personnes handicapées, Jérémie Boroy, président du CNCPH, Vincent Assante et Marie-Pierre Toubhans, vice-présidents du CNCPH, et Anthony Aubé, association des personnes de petite taille (APPT).

Replay de la clôture des 2èmes universités d’été du conseil national consultatif des personnes handicapées, le 22 septembre 2021.

Jérémie Boroy : Bonjour à tous. Merci d’avoir suivi avec nous ces trois jours d’universités d’été du CNCPH. Nous sommes maintenant à l’heure de la clôture de cette 2ème édition des universités d’été. Nous sommes avec Sophie Cluzel, la ministre, qui était avec nous pour l’ouverture et qui est avec nous pour la clôture. Je la remercie. Pour démarrer cette clôture, comme les sujets ont été nombreux pendant trois jours, j’ai demandé à trois personnes qui ont animé ou qui ont participé à des échanges au cours de ces universités d’été de partager avec nous quelques sujets, ce qu’ils ont retenu de ces échanges et voir sur quoi on doit se projeter ensemble sur nos prochains travaux. Nous serons avec Anthony Aubé de l’Association des Personnes de Petite Taille, qui est membre du CNCPH, Vincent Assante, le président de notre commission compensation et ressources, et Marie-Pierre Toubhans, la présidente de la commission éducation du CNCPH. Si vous le voulez bien, on va donner la parole à Anthony, puis à Vincent et Marie-Pierre. Et ensuite, avec la ministre on pourra prolonger notre échange.

Anthony Aubé : Merci pour cette prise de parole. Les universités d’été ont été le commencement de longs échanges, et surtout l’intérêt que porte l’institution aux personnes concernées. On a longtemps débattu des personnes handicapées en parlant d’elles, en prenant soin, en s’occupant d’elles, mais il faudrait vraiment s’intéresser à leurs droits, à leur place dans la société. Leur parole est à mon sens capitale dans l’évolution de leur considération. J’ai longtemps débattu avec Monsieur Pierre-Yves Baudot sur le choix des mots. Dans la communication de manière générale, les médias, le politique aussi, il est important de choisir les bons mots. Ça traduit la façon de penser, la façon dont on pense, perçoit toutes les personnes en situation de handicap. Il faut vraiment valoriser les droits, et surtout, prendre en compte la parole des personnes concernées.

Jérémie Boroy : Très bien. Merci beaucoup, Anthony. On va écouter maintenant Vincent Assante.

Vincent Assante : Bonsoir madame la ministre, bonsoir à tous. Une fois de plus, les universités d’été ont été très intéressantes, d’abord par l’investissement des personnes, la qualité des intervenants, la diversité des sujets abordés, sans concession mais avec beaucoup de civilité bien entendu. Ce que j’en retiens, c’est la nécessité d’être très clairs sur les termes, aussi bien en ce qui concerne globalement les représentants officiels, que les responsables associatifs. Par exemple sur le terme « handicap ». Ça m’a beaucoup frappé dans la table ronde la communication et le handicap. De quoi parle-t-on ? Est-ce qu’il s’agit des déficiences ? Cette table ronde comportait des représentants des chaînes de télévision, donc la communication. De quoi parle-t-on ? Est-ce que nous sommes sur les déficiences, les déficiences des personnes comme on voit dans les émissions dans lesquelles on va traiter des problèmes cardiaques avec les conséquences que cela va avoir, avec des problèmes de diabète et ses conséquences ? Et ce qui nous concerne plus directement, les difficultés motrices, entre les vieux de la polio, les personnes tétraplégiques voir IMC, les difficultés peuvent être différentes. De quoi parle-t-on ? Ou est-ce qu’on parle du handicap dans le sens de l’OMS, à savoir handicap l’interaction des difficultés personnelles de l’individu et son environnement ? Si on parle de handicap dans le sens de déficiences, évidemment on va parler des personnes, de la population française dans sa diversité. 
De mettre l’accent sur 15 % de la population mondiale, c’est juste. Mais au risque de passer à côté si on néglige les questions de l’environnement. 

Comment introduire sans tomber dans le misérabilisme, sans tomber dans l’héroïsme ? On a parlé de « L’homme de fer » dans les années 60. C’est bien. On nous a montré également une émission politique, de communication faite par la fédération internationale à l’occasion des Jeux olympiques. On y voit des personnes dites handicapées, avec un handicap visible, qui rigolent et qui sont de bonne humeur. C’est très bien. Cela montre aux personnes dites valides qu’on peut être une personne dite handicapée et être de bonne humeur, être capable d’une grande énergie. Le facteur environnemental est négligé. Il faut être précis sur les termes. Cela recoupe complètement le débat entre les rapporteurs des nations unies, le ministère, les associations… Bref on est tous concernés. Il faut que nous fassions tout un effort pour bien arriver à être précis sur les termes. 

D’autant plus que nous sommes nombreux à penser que la définition qui figure dans la loi de 2005 n’étant pas la bonne définition, je le pense et je ne suis pas le seul, tant qu’on aura une définition de ce genre, on aura des articles qui vont découler de cette loi et qui ne permettent pas de répondre totalement, de prendre à bras-le-corps la politique nécessaire pour permettre aux personnes d’être plus autonomes et plus dans la société. Voilà ce que je retiens. Je rajoute une confirmation de ce que je pense depuis longtemps, à savoir qu’il faut faire très attention lorsqu’on dit qu’il faut changer le regard. Je suis d’accord évidemment. Pour avoir supporté comme beaucoup d’autres des regards conventionnels, de gêne, des regards parfois d’horreur ou parfois d’admiration. Ce qui revient à peu près au même quand on sait où se situent les racines de cette admiration. Je pense que c’est la capacité que l’on va offrir aux personnes d’être intégrées dans la cité au sens large, qui va permettre de changer le regard. Ce n’est pas attendre qu’on change le regard pour permettre une véritable intégration et qu’ensuite l’accessibilité, franchement, je n’y crois pas. J’ai trouvé cette confirmation au travers des débats contradictoires au sein de ces trois jours. Trois jours passionnants, qui ont ouvert beaucoup de problèmes, beaucoup de questions, beaucoup de pistes aussi qui ne sont pas refermées. Des universités extrêmement positives.

Jérémie Boroy : Merci. Je vous propose d’entendre Marie-Pierre Toubhans qui a animé deux tables rondes, dont l’une sur l’enseignement supérieur et l’autre il y a quelques minutes sur l’école.

Marie-Pierre Toubhans : Bonsoir à toutes et tous. Madame la ministre bonsoir. Je vais plutôt interpeller sur de quoi parle-t-on quand on parle d’école inclusive et d’enseignement supérieur accessible, qui sont les deux thématiques sur lesquelles j’ai eu l’occasion de m’investir sur ces trois jours. Sur chacun des sujets, un élément de force. Le premier, c’est le fait que le CNCPH a lancé ce jour le chantier qu’on attendait tous sur l’enseignement supérieur et la recherche. La table ronde a particulièrement souligné l’enjeu de l’accessibilité de l’enseignement supérieur, de ses transformations, de son fonctionnement, de ses responsabilités, de la nécessité également d’un nouvel élan, tenant compte d’une approche globale de la vie des jeunes. C’est ressorti de façon très forte de la part des étudiants et des collectivités territoriales qui ont été amenés à intervenir sur la table ronde. Vous avez lancé, il y a quelques mois, avec Frédérique Vidal, une concertation sur ce sujet, sur l’enseignement supérieur. Le CNCPH y participe pleinement. Jérémie en partie et moi aussi également dans l’animation des groupes de travail. Je voulais savoir quelles sont les premières pistes que vous retenez sur ces travaux et quelles sont les perspectives que vous voyez dans les mois qui viennent. 

Deuxième élément sur la question de l’école inclusive. Je vais faire référence au comité national du suivi de l’école inclusive qui a eu lieu en juillet dernier. Vous nous aviez donné un rendez-vous à l’automne sur la question de la coopération. Tout à l’heure, on a posé la question de savoir si les dispositifs spécialisés devaient relever de l’Éducation nationale. C’était le fil conducteur de nos échanges. On voit sur ces sujets que les lignes bougent, que des expérimentations diverses sont en cours, et les expérimentations commencent à durer donc sont-elles encore des expérimentations ? Comment est-ce qu’on les évalue pour pouvoir passer à un cap supérieur ? Et les recommandations qui ont pu nous être faites. Tout cela nous invite à aller plus loin. On a envie de voir, de savoir, de co-construire les prochaines étapes pour envisager une Éducation nationale pour tous.

Jérémie Boroy : Merci, Anthony, Vincent et Marie-Pierre. Je vais commencer par les remerciements que nous avons en général pour la fin quand tout le monde est fatigué et pressé de partir. Ces remerciements sont aussi l’occasion pour moi de montrer la grande mobilisation qui a permis la tenue de ces 2èmes universités d’été du CNCPH. Chacun d’entre vous qui avez suivi avec nous ces débats, ces tables rondes, ces cafés littéraires, ces flashs innovation, c’est la Bibliothèque nationale de France qui nous accueille ici, dans ses bâtiments, sur le site de François Mitterrand. Je remercie Anthony Humbert qui a été très disponible et qui a permis que cet événement puisse se tenir. Le CCAH dont je salue chaleureusement la directrice Karine Reverte, dont le soutien nous a été précieux. La fédération générale des PEP dont nous connaissons très bien ici la présidente Dominique Gillot qui a contribué à l’aspect technique de notre évènement pour que tout le monde puisse le suivre dans de bonnes conditions avec Carine, Pascal, Nicolas, Thibaut et beaucoup d’autres derrière les caméras pour que cet évènement soit possible. C’est Handicap.fr qu’est notre partenaire cette année, Emmanuelle Dal’Secco et Gilles Barbier ont animé plusieurs de nos échanges. Je remercie Maxime Daridan de NextRadioTV et Armelle Weisman du Réseau entreprendre de Paris qui ont animé nos échanges. Ce sont les interprètes en LSF, les codeurs, et les transcripteurs qui se relaient depuis lundi pour assurer l’accessibilité de tous nos échanges. Et bien sûr, le secrétariat général du Comité interministériel du handicap et l’équipe animée par Céline Poulet avec Miroslava, Maxime, les deux Sophie, Lucette, Juliette, Jérémy, Salomé et Léa et bien d’autres encore. Et tous les membres du CNCPH, tout le comité de gouvernance, nos 9 présidents des commissions, Matthieu Chatelain, Vincent Assante, Fernando Pinto Da Silva, Danièle Langloys, Marie-Pierre Toubhans, Jean-Luc Simon, Martine Vignau, Joris Delivre-Melhorn, Philippe Aubert et le réseau aussi des hauts fonctionnaires qui est mobilisé avec nous sur la plupart de nos réunions. 

Je ne vais pas revenir sur l’année qui s’est écoulée depuis les 1res universités d’été, des faits marquants ont jalonné nos travaux. Je pense aux deux réunions du Comité interministériel du handicap, la première s’est tenue en novembre avec Jean Castex. La dernière, en juillet dernier. Le Premier ministre a décidé désormais, que le CIH se réunira deux fois par an, ce qui amène encore un rythme plus régulier dans nos échanges avec l’ensemble des ministères. Des échanges qui font la co-construction qui est la raison d’être du CNCPH. Je reviendrai sur quelques sujets. D’abord, le sujet des ressources. Il va nous mobiliser encore. Nous lançons dès aujourd’hui les assises du CNCPH sur les ressources des personnes dites handicapées. Ces travaux vont nous mobiliser jusqu’à la fin de l’année prochaine. Notre objectif est de définir collectivement avec l’ensemble des parties prenantes ce qui justifie les ressources spécifiques aux personnes dites handicapées. Et ce qu’il faut pour qu’elles puissent accéder à un niveau de ressources décent, qui s’éloigne du seuil de pauvreté et qui permette une réelle autonomie en tenant compte de la diversité des profils et des configurations. Nous nous sommes positionnés sur la question de la déconjugalisation. Dans le même temps, nous ne perdons pas de vue que la déconjugalisation est un élément du débat et qu’il faudra prendre en compte tous les mécanismes qui peuvent conduire soit à maintenir les personnes handicapées dans des situations inacceptables, soit à leur permettre de leur donner les moyens de leur autonomie en fonction de leur choix dans le cadre de notre solidarité nationale sur la base de l’égalité entre tous les citoyens. C’est précisément l’enjeu de nos assises, je remercie Pascale Ribes la présidente de l’APF et Fabrice Lenglart le directeur de la DRESS, qui ont déjà accepté d’accompagner nos travaux avec l’ensemble des commissions du CNCPH.

Christophe Devys président du collectif Alerte et Jean-Marie Burguburu président de la CNCDH ont également contribué à notre débat de cet après-midi. Nous pouvons compter sur eux pour prolonger notre collaboration sur ce chantier essentiel. Dans le prolongement de l’intervention de Marie-Pierre sur l’enseignement supérieur, nous lançons notre chantier dès aujourd’hui. Nous allons constituer avec Marie-Pierre un comité de pilotage. Je remercie Cédric Villani, le député de l’Essonne, Éric Chenut Vice-Président de la Mutualité Française et Hélène Legault de l’ONISEP qui ont accepté nos travaux et nos réflexions avec les membres du CNCPH dont beaucoup sont déjà impliqués au quotidien dans le développement de l’accès à l’enseignement supérieur en France. Nous devons rapidement dépasser notre retard en la matière pour faire de l’enseignement supérieur non plus un cauchemar ou un objectif inatteignable, mais un réel tremplin pour les jeunes. Ce sera une réunion plénière tous les deux mois qui sera ouverte, et en alternance, avec la réunion des assises sur les ressources. Marie-Pierre proposait que nous lancions les vendredis du CNCPH. Je propose qu’on retienne ce rendez-vous.

Parmi les sujets développés depuis lundi, une autre de nos priorités, c’est l’accessibilité des élections. Nous sommes revenus sur un fait marquant de ces derniers mois. C’est la loi relative à l’élection du président de la République qui précise désormais que « les candidats veillent à l’accessibilité de leurs moyens de propagande électorale aux personnes en situation de handicap, en tenant compte des différentes formes de handicaps et de la diversité des supports de communication. Ils peuvent consulter, à cette fin, le CNCPH qui publie des recommandations ou des observations. Au plus tard au 1er juin 2023, le gouvernement remettra au Parlement un rapport qui comprendra une évaluation des moyens mis en œuvre par les candidats à l’élection du président de la République et une analyse des évolutions juridiques et techniques nécessaires pour améliorer l’accessibilité de la propagande électorale aux personnes en situation de handicap, y compris lors des autres consultations électorales. »

Il ne s’agit pas encore de faire de l’accessibilité une des conditions de remboursement des frais de campagnes, cela aura été préférable mais ces nouvelles dispositions vont permettre de sensibiliser, d’interpeller tous les candidats pour qu’ils intègrent dès à présent les outils d’accessibilités qui sont nécessaires à la participation des personnes, peu importe leur contrainte d’action à la communication et au débat public, et que ces personnes puissent participer dès maintenant aux rdv de 2022. 
Ces campagnes électorales concernent également les médias audiovisuels qui animent les campagnes et les débats publics. Nous en avons parlé hier avec le président du CSA. C’est ce qui nous a conduits à mettre en place l’Observatoire de l’accessibilité des élections des campagnes électorales de 2022 pour l’élection présidentielle et les élections législatives, pour suivre de près le bon respect chez toutes les formations politiques des recommandations que nous allons rediffuser. Il y aura un relevé hebdomadaire dès le mois de janvier. Nous allons associer à notre comité de pilotage des experts des questions électorales. On parle d’accessibilité des élections, mais le sujet, c’est aussi de voir comment on peut, lorsqu’on a un handicap, se présenter à une élection et lorsqu’on est élu, avoir les moyens d’assurer son mandat, peu importe les moyens de compensation. 

La participation au débat public passe aussi par l’accessibilité des civics techs. Ce sont les applications des services numériques utilisés pour faciliter les échanges entre les citoyens, les élus, les collectivités. Nous avons considéré avec la commission Accessibilité présidée par Fernando Pinto Da Silva que la non accessibilité de ces outils cela pourrait créer un nouveau fossé entre les citoyens déjà écartés du débat public et le reste de la société. Alors même que leur accessibilité serait un facilitateur et même un accélérateur de leur participation aux consultations, aux échanges. Nous nous sommes engagés dans un dialogue avec l’association Démocratie Ouverte et Make.org. Nous allons les retrouver d’ici la fin de l’année pour signer une charte d’engagement sur l’accessibilité des civics techs et nous pourrons ensuite je l’espère mobiliser l’assemblée nationale, le Sénat, le CESES pour qu’ils amplifient eux aussi leurs efforts et rendent accessibles totalement et systématiquement l’information des citoyens. 

Un autre sujet développé depuis lundi, c’est celui des prisons. Nous avions déjà adopté au CNCPH une motion pour l’accès aux soins des personnes handicapées incarcérées. L’échange que nous avons eu hier avec le contrôleur auprès de la contrôleuse générale des lieux de privation de libertés et le ministère de la Justice nous encourage à bâtir une feuille de route commune et d’en faire un chantier prioritaire pour la deuxième partie de notre mandature. La vie sexuelle, la vie intime et amoureuse ont aussi été évoquées. Madame la ministre, vous aviez saisi en 2020 le CCNE pour qu’il nous éclaire sur le sujet précis de l’accompagnement sexuel. Je me permets de vous confirmer que ces recommandations sont attendues.

Nous avons évoqué le chantier prioritaire sur les violences faites aux femmes. Cela nous concerne tous et nous devons collectivement amplifier notre mobilisation pour combattre ce fléau que sont les violences qui sont faites aux femmes handicapées. Nous allons continuer à nous mobiliser dans les travaux interministériels pour aller encore plus loin et embarquer le plus de monde possible dans notre mobilisation. 

Évidemment, nous avons évoqué les recommandations de l’ONU, qui ont été diffusées suite à la première audition de la France les 18, 20 et 23 août derniers par le comité des droits des personnes handicapées de l’ONU. Ces recommandations ont fait l’objet d’un débat pendant trois jours. Hier, nous avons eu un entretien avec le rapporteur pour la France. Les recommandations sont nombreuses. Madame la ministre, dès la publication des recommandations, vous nous avez confié la mission de faire des propositions pour continuer à nous améliorer au CNCPH sur la participation des personnes, sur la représentation des personnes handicapées. Nous allons nous y employer nous démarrons vendredi matin dès notre prochaine plénière. Mais déjà, quelques pistes : 

La première va consister à renforcer nos liens avec les Conseils départementaux de la citoyenneté et de l’autonomie. Le CNCPH doit être la tête de réseau et doit avoir un rôle important d’animation pour nous rapprocher encore plus des citoyens sur le terrain. Deuxième piste essentielle celle des jeunes de 20 à 25 ans. Nous devons absolument réunir toutes les conditions pour que les jeunes, peu importe leur handicap ou les organisations auxquelles ils appartiennent, aient les moyens de s’impliquer à nos côtés. Pas seulement sur les questions qui concernent les jeunes mais ils ont toute leur place dans le débat. Il est vraiment important qu’on puisse faire cela. La participation des personnes suppose des moyens pour que les organisations puissent se consacrer pleinement à leur mission de représentation. Ces moyens doivent permettre aussi la nécessaire accessibilité de leur environnement, des réunions, des supports de concertation, en prenant en compte toutes les formes d’accessibilité. Nous nous y employons au CNCPH. Nous avons adopté un nouveau règlement qui précise clairement les modalités d’accessibilité de nos travaux : c’est la langue des signes, la langue française parlée complétée, la transcription, l’accessibilité des supports que nous diffusons. C’est également dans quelques semaines, l’obligation sera faite dans l’ensemble des administrations les documents en FALC, qui va inciter l’ensemble des acteurs à prendre en compte toutes les dimensions d’accessibilité pour que nous n’écartions personne de nos propres travaux. On doit aussi veiller…

Sophie Cluzel : Vous me laisserez du temps pour répondre ?

Jérémie Boroy : J’ai bientôt fini. Nous devons fédérer le plus grand nombre, mais aussi faire en sorte que les personnes qui sont concernées par les sujets que nous traitons, c’est-à-dire nous-mêmes, les personnes handicapées, nous puissions nous reconnaître dans celles qu’ils représentent. C’est un sujet sur lequel on doit travailler dans les prochaines semaines. Tout en faisant attention à ne pas enfermer les personnes handicapées dans la seule représentation des personnes handicapées. Les personnes indépendamment de leur handicap ont vocation à participer à toute la vie publique, à tous les sujets au-delà de leur seul handicap. Il y a beaucoup d’autres sujets. Ces recommandations vont nous amener à nous réinterroger sur la définition du handicap. Elle a été remise en cause par l’ONU, qui considère que la définition de la loi de 2005 n’est pas conforme à ce qui est recommandé. Elle aurait une approche trop médicale. Nous devons en tenir compte et échanger dessus pour faire en sorte que la question de l’environnement et la question du fait que les personnes handicapées sont toujours des sujets de droit figurent au cœur d’une nouvelle définition qu’on devra partager. Il faudra définir l’autonomie qui nous mettra d’accord. C’est ce que le conseil pour les questions sémantiques sociologiques et éthiques présidé par Philippe Aubert va engager dans les prochains jours. Ils ont déjà la mission que nous leur avons confiée ensemble sur la sémantique que nous utilisons lorsque nous parlons d’emploi avec parfois des termes un peu bizarres qui nous amène à parler de reconnaissance de qualité de travailleur handicapés. Nous avons encore de longs débats devant nous. C’est évidemment le sujet de la coopération avec tous les acteurs. On y reviendra dans les prochains mois. Un mot pour évoquer la convention citoyenne que nous avons lancé pour la première fois cette année, qui a porté sur la question de l’isolement, avec la commission Territoire et citoyenneté. Nous allons pouvoir réfléchir au prochain thème de la convention que nous allons engager au CNCPH. Il y a également d’autres sujets. Je vais m’arrêter là pour vous laisser le temps de nous répondre. Merci.

Sophie Cluzel : Merci beaucoup, Monsieur le Président. Ces universités d’été vous en avez fait la preuve, elles ont été très riches en échanges. Je voulais saluer cette capacité à avoir fédéré les différents intervenants de toute la société civile, qui sont venus, qui ont participé à vos travaux. Félicitations pour cette richesse, et surtout, cette participation pleine et entière qui est celle qui nous anime c’est construire ensemble. Deux ou trois rebonds sur ce qu’on dit les intervenants. Anthony Aubé a vraiment insisté sur le fait qu’il fallait partir des besoins des personnes. C’est le plus important, ce qu’il reprend à travers votre chantier de représentation des personnes handicapées. Je suis très intéressée par la vision de Vincent Assante sur l’impact de l’environnement sur la situation du handicap. C’est un sujet qui est transversal sur l’école, sur l’université, sur les plans inclinés du savoir dont parle régulièrement Charles Gardou, sur les adaptations de l’environnement pour mettre la personne en pleine situation de performances, de réussite, d’autonomie comme l’a dit Vincent Assante. C’est un fil conducteur qui doit traverser toute notre vision des politiques publiques. C’est très important de le rappeler en permanence. Le président de la République l’a signifié, il sera très attentif à vos conclusions. 

Je remercie le secrétariat général du CIH, Céline Poulet et son équipe qui vont nous transmettre tous vos travaux. Je remercie aussi la participation directe des personnes. Vous avez listé beaucoup de chantiers. Il y en a qui sont lancés, qui sont inscrits, qui des comités de pilotage et déjà une vie. Marie-Pierre Toubhans m’a interpellé sur notre rendez-vous de l’automne, le comité de pilotage de l’école inclusive. Le directeur de la DGESCO l’a dit, il faut améliorer les allers-retours, le fait qu’on va vers les établissements médico-sociaux, on va vers l’école, comment faire pour améliorer cette fluidité ? C’est un point majeur de l’ONU, l’école inclusive. Elle doit l’être, pas ségréguer les apprentissages. Comment avancer ensemble et comment la mobilisation des associations gestionnaires de ces équipes médico-sociale va pouvoir se transformer ? Je le vois tout le temps sur les territoires. Comment on participe nous l’Etat de façon ingénieuse avec les collectivités locales ? C’est pour cela que la représentation dans les CDCA locales sera importante, pour faire remonter ce qui existe sur les territoires. Il n’y a pas besoin de réinventer, il se passe plein de choses. Il faudra qu’on accélère ce faire-savoir et cette capacité à rebondir. On a un devoir d’équité territoriale. En France, on n’est pas au niveau sur cette égalité des chances, sur tous les territoires, que ce soit sur l’école, emploi, logement. Il faut une accélération de nos politiques publiques. 

Je suis aussi intéressée par votre observatoire de l’accessibilité. Le 29 septembre, avec Marlène Schiappa, nous allons lancer les travaux en présence de tous les élus. Accessibilité des élus, des campagnes, premières campagnes en FALC et la sensibilisation des parties, accessibilité du vote. Le droit de vote des personnes majeures protégées sous tutelle est une vraie avancée. Mais comment exerce-t-on ce droit ? Nous serons à vos côtés. 

Sur les prisons, pareil. J’en ai parlé longtemps avec Éric Dupond-Moretti, tout à fait partant. Il y a déjà une feuille de route croisée santé-prison, mais il faut qu’on la regarde sur le droit des personnes. Sur le fait de pouvoir rentrer dans les prisons pour l’application de droit pour les professionnels médico-sociaux. Il y a encore beaucoup de freins. On va aussi parler de l’insertion professionnelle des personnes handicapées dans les prisons. Il ne faut pas s’arrêter à la santé. Il faut aller aussi sur ce droit à avoir une activité adaptée à sa situation de handicap. 

Sur les engagements des civics techs, c’est important. Ça contribuera à cette accessibilité et cette conception universelle qui nous fait encore tant défaut. Combien d’applications qui ne sont pas pensés initialement ? On a des problèmes majeurs de formation des webmasters et là il faut être intraitable.

Cette feuille de route croisée avec Amélie de Montchalin, qui est très active sur cette mise en activité des sites numériques, des applications, le gouvernement doit s’en emparer, tous les ministères. On a encore des trous dans la raquette qu’il nous faut absolument réparer, car il en va de l’autonomie des personnes. C’est un vrai levier pour la démocratie et la participation citoyenne. Vous avez tellement de chantiers ! La violence faite aux femmes, bien sûr. La mobilisation est pleine et entière. Il faut regarder cela. Il faut travailler conjointement avec les associations de femmes mais également avec les associations de handicap. Il faut prendre en compte la situation de handicap et l’expertise de toutes les associations qui travaillent sur les violences faites aux femmes. C’est le cas des réunions de travail que nous avons en Gironde, en Loire-Atlantique. Il faut qu’on le développe vraiment.

On aura aussi un rendez-vous sur la PCH Parentalité. On a ouvert beaucoup de droits sur la PCH. Je vais lancer l’étude-action sur la PCH handicap psy. On a encore beaucoup de cheminement. Il nous faut les mettre en exergue. J’aurai besoin de vous. Des travaux avec le CNCPH, pour les personnes, les suppressions de barrières, les travaux sur la PCH surdicécité que je souhaite confier au CNCPH. Là aussi c’est un engagement pris lors du CIH et il nous faut les acter. Voilà les travaux en cours. 

La participation directe des personnes extrêmement importante. Je confie vraiment au CNCPH l’amélioration de la dynamique de représentation des personnes handicapées suite aux recommandations de l’ONU. Nous devons aller jusqu’au bout, nous poser les questions pour savoir si les personnes sont bien représentées, revoir ensemble sur vos propositions, sur la composition du CNCPH, les collèges, les personnalités qualifiées. Il ne faut pas enfermer la personne handicapée dans sa propre représentation et qu’elle puisse parler en tant qu’expert sur des sujets c’est très important. 

Dernier point : la vie sexuelle. J’ai saisi le comité consultatif national d’éthique qui m’a rendu ces propositions. Ce n’est pas vraiment un avis. C’est une lecture qu’il a faite, très intéressante. Ce que je peux vous dire, depuis 2012, la société a évolué. Ils ont fait un travail remarquable et je tiens à le souligner et nous avons été empêchés par la crise sanitaire. Le constat est que la société évolue. Ils ont fait un énorme benchmark des pays européens pour pouvoir se positionner sur ce qu’il se passe en Europe. Il y a eu beaucoup d’auditions, des personnes de CNCPH ont été auditionnées mais pas que des associations, des personnes, celles qui travaillent déjà, les instances administratives… Ce débat s’inscrit dans un projet de société. Il y a trois pistes remises par le CCNE : 

D’abord, l’encrage, la généralisation et le développement sur tout le territoire, les centres-ressources sur la vie intime, affective, sexuelle et soutient à la parentalité pour toute personne en situation de handicap. Il s’inscrit dans une démarche. Déployons massivement ces centres. Le comité souhaite qu’il puisse être inscrit dans le projet de tout établissement et service à domicile une politique qui favorise un droit d’accès à la vie relationnelle, affective et intime. Nous allons faire des progrès sur la formation des professionnels. Les instructions que nous avons diffusées sur le respect de l’intimité des personnes y participent. C’est un mouvement global qu’il faut opérer. 

Troisièmement, s’agissant donc de l’opportunité de conduire une expérimentation visant à créer un service d’accompagnement à la vie intime pour les personnes. Le comité n’y voit pas d’opposition éthique. Il reconnaît un droit d’accès à santé sexuelle des personnes en situation de handicap. C’est une reconnaissance importante pour un sujet sociétal qui est en train d’évoluer. Je souhaite que le CNCPH, encore un chantier, puisse s’approprier l’avis et organiser ce débat de société. J’ai toute confiance sur le fait que c’est au CNCPH de porter ce débat. Nous serons à vos côtés. Je vous transmets l’avis et vous pourrez le porter. Je crois que vous avez une plénière vendredi. Dès ce soir, je vous mandate officiellement par lettre en vous donnant l’avis. Je souhaite que le CNCPH puisse me faire des propositions de débats et pour qu’on puisse avancer sur ce sujet majeur dans le cadre des recommandations de l’OMS qui est que toute personne a le droit à une santé sexuelle, dans le cadre d’une feuille de route très importante, qui est déjà travaillée sur plusieurs aspects : les centres de ressources, les centres sur la parentalité etc… Voilà ma proposition. Je sais pouvoir compter sur le CNCPH. J’ai déjà missionné sur la représentation des personnes handicapées. Vous êtes en train de travailler sur l’observatoire d’accessibilité des élections. Nous avons nos comités de pilotage sur les grands sujets. 

Dernière saisine que je vous fais, c’est de travailler sur ce beau sujet qui, j’espère, saura porter de façon sereine, apaisée, mais nous le devons aux personnes en situation de handicap. Nous devons pouvoir en débattre sereinement. Vous aurez donc l’avis et mon mandat officiel par lettre dès ce soir. Vous avez un programme très riche. Je serai toujours à vos côtés pour co-construire nos politiques publiques. Nous avons des rendez-vous à l’automne. Le comité de pilotage école inclusive et coopération. Nous avons cette belle Semaine Européenne de l’Emploi des Personnes Handicapées et duo day pourquoi si important ? 
C’est important, car ce sera le tremplin pour la présidence française de l’Union européenne. Et là aussi nous allons co-construire, j’aurais une grosse réunion interne avec les ministres du handicap le 9 mars. C’est juste après le dernier point après c’est devoir de réserve. Ce sera contraint, mais on va y arriver. Je sais pouvoir compter sur l’ensemble des équipes du CNCPH pour travailler de façon active, même avec des délais un peu courts. Et puis bien sur les assises ressources, je remercie Fabrice Lenglart, de pouvoir être à vos côtés. C’est un chantier au long cours. On ne doit rien oublier. J’ai certainement oublié des choses, mais en tout cas, bravo, merci. Ces universités d’été, qui ne sont pas encore en automne, presque, sont extrêmement riches. Je compte sur le secrétariat général du CIH pour nous faire une belle restitution et que je ferai moi-même au président de la République, très sensible à vos travaux.

Jérémie Boroy : Merci beaucoup pour ces perspectives. Le CNCPH va rester mobilisé encore longtemps dans les prochaines semaines. Nous avons une nouvelle saisine, celle de l’organisation d’un débat de société dans le prolongement des travaux du comité d’éthique pour nous emparer du sujet de l’accompagnement sexuel. Nous prenons cette responsabilité. Vous évoquez la présidence française de l’Union européenne. Nous allons donc partager avec vous des propositions pour que nous puissions prendre toute notre place dans ce moment important. Je vous remercie d’avoir rappelé le tweet du Président de la République qui fait référence à notre rencontre et nous invite à lui transmettre les conclusions de nos universités d’été. Merci pour ces perspectives. On ne partira pas sans remercier Planni-Presse qui a aussi permis la réalisation de cet événement. Sans eux et sans les les autres partenaires, nous ne serions pas là aujourd’hui. Je remercie Kristoff Fluder, qui nous a fait hurler de rire. J’espère qu’il est partant pour remettre ça ce soir. Merci à vous tous et j’espère que les 3èmes universités d’été l’année prochaine seront en présentiel. 

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